Pluton
Malgré la déchéance de Pluton du rang des planètes décidée en 2006 par une majorité d’astronomes réunie en congrès, celui-ci ne semble pas en être affecté le moins du monde, du moins pour les astrologues. Bien au contraire, sa marque est clairement perceptible dans l’évolution de la société contemporaine, mais sous des formes suffisamment différentes pour que le regard profane ne puisse y voir un lien. C’est du reste en cela que le regard astrologique permet de le reconnaître.
Les origines de la crise
La crise économique qui s’est déclarée en septembre 2008 lors de la première opposition Saturne-Uranus a pour origine une crise purement financière, sans lien avec l’économie réelle. Comme on le sait, des produits financiers « à risque », c’est-à-dire fondés sur des crédits douteux, ont été introduits sur le marché boursier à seule fin de faire exploser le bénéfice des banques et des établissements financiers. Bien évidemment, quand le remboursement de ces crédits a commencé à faire défaut, c’est le système financier tout entier qui s’est trouvé ébranlé car ces produits « sales », c’est-à-dire corrompus, étaient inextricablement mêlés aux autres.
La crise financière
De là a éclaté la crise économique dont on disait il y a encore un an qu’elle était la plus grave de tous les temps. Elle a en fait pour véritable origine le détournement du rôle des banques : au lieu de financer l’économie, celles-ci se sont orientées vers la recherche exclusive du profit maximal en un temps minimal, ce que l’on désigne pudiquement par « capitalisme financier ». Encouragé par la politique néo-libérale de la précédente administration américaine, ce détournement correspond à la fascination exercée par l’argent issu de la spéculation, en lieu et place de celui généré par le travail. S’agissant de l’argent symbolisé par le Scorpion et non par le Taureau, il se trouve de ce fait sous l’influence de Pluton (plutos signifie riche en grec ancien) et exerce sur ses détenteurs un pouvoir proportionnel à sa quantité.
Le pouvoir de l’argent
Ce phénomène d’enrichissement à grande échelle concerne tous les pays, riches et pauvres, et le nombre de milliardaires en dollars a fait un bond au cours des dix dernières années. Désormais, c’est la loi exclusive du profit qui s’exerce au sein des grandes entreprises, et non plus le développement de l’activité réelle et encore moins l’épanouissement des salariés. Pour preuve, les rachats permanents d’entreprises par leurs concurrentes en vue de la formation de vastes holdings, avec leur cortège de licenciements. Les richesses se trouvent ainsi concentrées aux mains d’une infime catégorie de personnes dans le monde, que l’on pourrait désigner par « oligarchie ploutocratique ». Et à cette accumulation de richesses « légales » il faut ajouter celles illégales générées par les mafias qui fleurissent un peu partout. Leur développement, notamment en Russie ou en Chine, est à la base d’une véritable économie parallèle fortement teintée des couleurs de Pluton puisque basée sur la drogue, la prostitution, le racket ou le trafic d’armes. On notera à ce propos qu’en Afghanistan l’argent tiré de la récolte du pavot est utilisé pour armer les groupes talibans et d’autres mouvements islamistes radicaux.
Le terrorisme
A l’évidence, ces derniers représentent aussi une expression contemporaine de Pluton : leur fanatisme aveugle, leur détermination sans faille, leur mode d’action marqué par le secret et l’autodestruction (les bombes humaines), leur caractère implacable, extraordinairement violent et sans considération pour l’humain, de même que la haine qu’ils professent pour ce qui ne leur est pas semblable et particulièrement pour l’Occident, tout cela ne laisse guère de doute quant à leur signature symbolique. Cependant, à bien y réfléchir, qu’il s’agisse du terrorisme islamique ou des dérives actuelles du capitalisme financier, il s’agit de deux branches, certes diamétralement opposées, des mêmes forces souterraines à l’œuvre.
L’islam
Si le christianisme relève de la symbolique des Poissons, la Tradition rapporte que l’islam procède de celui du Scorpion. Or, la présence de plus en nombreuse de la communauté musulmane en Europe occidentale, particulièrement en France et en Allemagne, suscite des inquiétudes au sein d’une partie de la population. Celles-ci sont entretenues par les différences de culture, les usages religieux, parfois par les difficultés ou les refus d’intégration et les revendications d’identité. Elles sont alimentées en outre par ce que rapportent les médias des activités des groupes terroristes islamistes (Al Qaida), mais aussi des innombrables conflits mettant aux prises les communautés musulmanes entre elles (chiites et sunnites), les communautés musulmanes et d’autres communautés (Inde, Liban, Asie du Sud-est), ainsi que des conflits ou des menaces de conflit impliquant des pays islamiques (Iran, Pakistan, Afghanistan, etc.), sans oublier le conflit israélo-palestinien. De ces peurs plus ou moins irrationnelles — ou plus ou moins justifiées, selon le point de vue duquel on se place — mais entretenues depuis longtemps, naît le sentiment d’une menace latente, du moins dans certaines régions et certains milieux. Or ce ressenti fait appel aux instincts les plus profondément enfouis qui ne se réveillent qu’en cas de danger réel ou supposé : l’instinct de défense et de survie dont on sait qu’il est symbolisé par le Scorpion.
L’extrême droite
De toute évidence, c’est ce qui explique en grande partie la montée lente mais apparemment inexorable de l’extrême droite en Europe. Celle-ci gagne du terrain non seulement dans les régions sensibles, mais encore dans des pays non spécialement concernés par l’immigration tels les Pays-bas, la Belgique ou les pays d’Europe orientale. Comme l’Histoire le montre, ces mouvements extrémistes participent bien évidemment aussi de la dynamique plutonienne, avec son cortège d’outrance, de violence, de manipulation et de haine. La démocratie est symbolisée par le signe du Cancer et par sa maîtresse, la Lune, symbole de l’inconscient collectif. Or, analogiquement à la chute de la Lune dans le Scorpion, l’inconscient collectif s’obscurcit quand il est durablement soumis à la peur et cède pour un temps sa place aux instincts chargés d’assurer la survie de la collectivité. C’est alors que la violence se déchaîne et que s’ensuivent les pires atrocités, comme c’est le cas dans la guerre civile.
La tentation sécuritaire
Certes, nous n’en sommes pas là et souhaitons de ne jamais y parvenir. Toutefois l’on constate ça et là de la part des politiques une tendance sécuritaire, un renforcement des contrôles, un durcissement des règles que l’on pourrait assimiler à la volonté d’élever le rempart de la Loi (Saturne) contre les forces pulsionnelles (Pluton). Au vu des moyens technologiques qui existent actuellement et qui sont susceptibles d’être orientés dans un but sécuritaire, il suffirait d’une situation exceptionnelle pour que la liberté individuelle ne soit plus qu’un souvenir. Tout ceci s’inscrivant, faut-il le rappeler, dans un contexte où Saturne est arrivé au carré de Pluton.
La manipulation des noyaux
On l’a vu pour l’argent, Pluton exerce son pouvoir sur ceux que le pouvoir fascine — l’anneau de pouvoir de la mythologie germanique, revisité par J.R. Tolkien dans Le Seigneur des anneaux. Après avoir trouvé la source d’énergie infinie dans le noyau des atomes, l’Homme va désormais chercher la source de vie dans le noyau des cellules avec les manipulations génétiques. Avant même qu’ils aient fait la preuve de leur innocuité pour l’homme, les OGM sont en passe d’être massivement introduits dans la nourriture humaine, après l’avoir été dans celle destinée aux animaux. Les variétés de bétail sont obtenues non plus par croisements, mais par manipulations génétiques en laboratoire. Le « génie génétique » promet pour demain l’éradication des maladies, le remplacement des organes défaillants, un allongement substantiel de l’espérance de vie… et pour bientôt la vie éternelle.
Pouvoir et fascination
Pluton a laissé l’Homme s’emparer du noyau dont il avait la garde, or c’est dans le noyau que réside la clé de la vie et de la toute-puissance. Mais si aujourd’hui les forces contenues dans le noyau lui appartiennent, l’Homme ne semble pas conscient de la fascination que ces forces exercent sur lui. Par ailleurs, on dirait même que les décideurs usent à leur tour de ce pouvoir de fascination et n’hésitent plus à en multiplier les sources afin de satisfaire aux instincts d’une bonne partie de la population, probablement afin de mieux la contrôler : pornographie, violence et jeux d’argent sont aujourd’hui aisément accessibles via la télévision et Internet.
L’épuisement des ressources énergétiques
Des richesses souterraines détenues par Pluton depuis la formation de la Terre, il ne reste qu’une partie, moins de la moitié en ce qui concerne le pétrole et à peine plus en ce qui concerne le gaz, les principales sources d’énergie avec le nucléaire. Quelques décennies auront donc suffi à extraire les ressources du monde souterrain, mais qu’adviendra-t-il lorsque, dans une trentaine d’années, celles-ci seront en voie d’épuisement ? A moins que les énergies alternatives ne se développent considérablement et ne parviennent à prendre le relais, il existe un risque majeur pour que survienne une lutte sans merci entre les principaux pays industriels pour l’utilisation des ressources restantes. La Chine, pays le plus peuplé de la planète et aujourd’hui deuxième puissance industrielle au monde, ne peut en effet se permettre une récession sans provoquer de graves désordres intérieurs et mettre en péril son régime. C’est du reste ce qu’a clairement démontré l’échec de la Conférence de Copenhague en 2010.
La destruction de l’environnement
Venons-en enfin aux deux points les plus saillants et probablement les plus caractéristiques de la marque de Pluton sur notre époque. Le premier concerne la dégradation accélérée et probablement irréversible de notre environnement, conséquence directe de l’industrialisation à outrance et de l’augmentation exponentielle de la population mondiale, laquelle a doublé en moins d’un demi-siècle. Pluton a donc déjà largement commencé son œuvre de corruption en submergeant progressivement la Terre des déchets produits par les hommes et en faisant disparaître un nombre croissant d’espèces végétales et animales. Il apparaît donc ici en tant que « justicier immanent », qui manifeste ses effets en tant que conséquences souvent imprévisibles mais toujours irrémédiables des actes accomplis.
La prolifération nucléaire
Le second point n’est pas moins inquiétant et nous ramène à la découverte majeure de l’époque de la découverte de Pluton : l’énergie atomique. Depuis la fin de la Guerre froide et de « l’équilibre de la terreur », de nouveaux pays se sont dotés de l’arme nucléaire ou sont sur le point de le faire : l’Inde, le Pakistan, la Corée du Nord, l’Iran. La prolifération nucléaire représente de fait le plus grand des dangers car elle rend caduc le consensus auquel étaient parvenues les grandes puissances. Depuis le passage de Pluton dans son domicile du Scorpion, le contrôle de l’arme atomique par ces mêmes grandes puissances devient de plus en plus problématique et la doctrine de la dissuasion ne s’applique plus de la même façon. Parmi les pays en cause, le régime pakistanais est affaibli par la corruption de son administration et entretient des rapports ambigus avec les extrémistes talibans, la Corée du Nord est sous le joug d’une dictature totalitaire et l’Iran sous celui d’un gouvernement religieux intégriste. Cette situation montre qu’il est vain de croire que les pouvoirs de Pluton peuvent rester indéfiniment sous contrôle. Et s’ils le sont un temps, c’est que ce temps est mis à profit pour créer dans l’invisible les conditions qui leur permettront d’échapper à leurs illusoires détenteurs.
La déstructuration de la société
La disparité exponentielle de l’échelle des revenus, la défiance grandissante envers les gouvernants, le démantèlement progressif des services publics, les menaces sourdes liées au communautarisme et à la peur de l’étranger, et plus généralement l’absence de visibilité concernant l’avenir, notamment pour les jeunes générations, tous ces facteurs correspondent au travail de sape, caractéristique de l’énergie plutonienne, qui affecte en profondeur les fondements sur lesquels reposent nos sociétés, distillant insidieusement incertitude et perte des repères. Même si ce phénomène est en œuvre depuis quelques temps déjà, l’entrée de Pluton en Capricorne en 2008 ne fait que le rendre plus manifeste et en accélérer le cours.
Conclusion
Ce survol de tendances que je considère comme propres à notre époque n’est en rien exhaustif, pas plus qu’il ne prétend amener d’informations nouvelles ; sans doute reflète-t-il également ma propre subjectivité. Son but est d’inviter à une réflexion basée sur les symboles que nous offre notre science et nulle autre. Par ailleurs, il est évident que les effets des trans-saturniennes sont étroitement intriqués et donnent lieu à des phénomènes complexes, tel par exemple l’ultralibéralisme économique (Uranus) conduisant au capitalisme financier (Pluton), la liberté liée à l’usage des véhicules individuels (Uranus) associée à l’impact des rejets sur l’effet de serre (Neptune), ou encore les marées noires impliquant à la fois le pétrole (Pluton) et l’océan (Neptune).
Il semble que s’opère un double mouvement : un mouvement ascendant inspiré par Uranus, par lequel l’homme conquiert la liberté, l’espace, l’universalité et frôle sa propre transcendance, et un mouvement descendant inspiré par Pluton, par lequel il conquiert la toute-puissance sur le monde ainsi que, potentiellement, les clés de sa propre transformation. Ces deux mouvements sont évidemment liés puisqu’Uranus est exalté en Scorpion : le dépassement de la condition humaine semble devoir passer par la chute dans le monde d’en bas, celui régi par Pluton.
Dans l’article suivant, L’avenir du monde dans les 10 ans, nous traiterons à nouveau des planètes trans-saturniennes, cette fois dans une perspective dynamique en les replaçant dans le cours de leurs cycles respectifs, ce qui nous amènera à proposer un schéma prévisionnel pour les années à venir et à formuler quelques hypothèses.
Publié dans « L’Astrologue » n° 171, octobre 2010.
Suite dans L’Avenir du monde dans les 10 ans.